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Fields of large transcendence degree generated by values of elliptic functions. (English) Zbl 0516.10027

Le théorème principal de cet article donne une minoration du degré de transcendance de certains corps engendrés par des valeurs d’une fonction elliptique. Soit \(\wp\) une fonction de Weierstrass ayant des invariants \(g_2, g_3\) algébriques, et n’ayant pas de multiplication complexe. Soient \(u_1,\ldots, u_n\) des nombres complexes linéairement indépendants sur \(\mathbb Q\), et satisfaisant une certaine mesure d’indépendance linéaire. Soient \(v_1,\ldots, v_n\) des nombres complexes linéairement indépendants sur \(\mathbb Q\) est satisfaisant la même condition. Alors la degré de transcendance \(t\) du corps obtenu en adjoignant à \(\mathbb Q\) les valeurs de \(\wp\) aux points \(u_iv_j\) pour les \(i, j\) \((1\leq i\leq n\), \(1\leq j\leq m)\) tels que \(u_iv_i\) ne soit pas pôle de \(\wp\) vérifie
\[ 2^{t+2}(t + 8)\geq mn/(m+ 2n). \]
C’est le premier exemple de corps ayant un grand degré de transcendance sur \(\mathbb Q\), engendré par des valeurs de fonctions elliptiques.
Quand on remplace \(\wp\) par la fonction exponentielle, des énoncés analogues ont été obtenus par Chudnovsky, Warkentin, Philippon-Reyssat, Endell, Brownawell, et Nesterenko (voir R. Endell [Zur algebraischen Unabhängigkeit gewisser Werte der Exponentialfunktion, Journées Arithmétiques 1983, Lect. Notes Math. 1068, 80–85 (1984; Zbl 0541.10030)]). Ces résultats sur la fonction exponentielle utilisent de manière essentielle un lemme (Gel’fond, Mahler, Tijdeman) concernant les petites valeurs de polynômes exponentiels, et l’analogue elliptique de ce lemme n’est pas connu. C’est là la source principale des difficultés.
Les auteurs ont déjà ébtabli un lemme de zeros pour un groupe algébrique commutatif [Invent. Math. 64, 489–516 (1981; Zbl. 467.10025)]. Ils remarquent que, pour une variété complète (ici une puissance d’une courbe elliptique), ce lemme de zéros, combiné avec une méthode d’élimination effective, doit donner un lemme de petites valeurs. Mais l’estimation ainsi obtenue n’est pas assez précise pour la méthode d’indépendance algébrique de Chudnovsky, et c’est une méthode nouvelle que les auteurs élaborent, dans laquelle il n’y a pas de critère d’indépendence algébrique.
Pour démontrer leur résultat, les auteurs introduisent plusieurs outils, dont l’intérêt déborde le cadre de cette étude, et qu’ils ont séparés en plusieurs chapitres largement indépendants. Dans le premier, ils raffinent leur lemme de zéros. Ils décrivent précisement ce qui se passe quand, pour un sous-groupe \(\Gamma=\mathbb Z\gamma_1+\ldots+\mathbb Z\gamma_n\) de type fini d’un groupe algébrique \(G\) de dimension \(n\) plongé dans \(\mathbb P_N\), il existe une hypersurface algébrique \(Z\) de \(\mathbb P_N\), de degré \(\leq D\), qui ne contient pas \(G\), mais qui passe par tous les points \(h_1\gamma_1+\ldots+h_n\gamma_n\), pour \((h_1,\ldots, h_n)\in\mathbb Z^n\), \((0\leq h_j\leq S)\), \((1\leq j\leq m)\) avec \(S\geq n(D/c)^{m/n}\), où \(c=c(G)\) est une constante explicite (ne dépendant que de \(G\) et du plongement de \(G\) dans \(\mathbb P_N\). Ce lemme de zéros raffiné a déjà plusieurs autres applications en théorie des nombres transcendants.
Dans le deuxième chapitre, ils comptent (avec leur degré) le nombre de composantes primaires isolées d’un idéal homogène dans un anneau de polynômes, en fonction du degré de générateurs. Ce type d’estimation apparaissait déjà dans un travail antérieur de W. D. Brownawell et D. W. Masser [Duke. Math. J. 47, 273–295 (1980; Zbl 0461.10027)].
Le chapitre 3 donne une version effective du théorème de Kolchin sur les sous-groupes algébriques d’une puissance \(E^n\) d’une courbe elliptique \(E\) sans multiplication complexe. Pour \(1\leq \nu\leq n\), notons \(\pi_\nu\) la projection de \(E^n\) sur le \(\nu\)-ème facteur. Si \(H\) est un sous-groupe algébrique de \(E^n\) de dimension \(\leq n-r\), avec \(1\leq r\leq n\), et si \(H\) peut être défini (dans \(\mathbb P_N\), avec \(N=3^n-1)\) par des équations homogènes de degré \(\leq D\), alors il existe des éléments \(\mathbb Q\)-linéairement indépendants \(\tau_1,\ldots, \tau_r\) de \(\mathbb Z^n\), avec \(\tau_i = (\tau_{i1}, \ldots, \tau_{in})\), \(1\leq i\leq r\), tels que
\[ \max_{1\leq \nu\leq n} | \tau_{i\nu}| \leq 2^{5N} D^{2r/(r+1-i)},\quad (1\leq i\leq r) \]
et
\[ \sum_{\nu01}^n \tau_{i\nu}\pi_\nu(h)=0,\qquad (1\leq i\leq r) \]
pour tout \(h\in H\). Le théorème du chapitre 2 est utilisé dans la démonstration de ce résultat. Les auteurs précisent que ce résultat du chapitre 3 peut être étendu à d’autres groupes algébriques (par exemple \(\mathbb G_m^n\), ou \(E^n\) quand \(E\) est une courbe elliptique ayant des multiplications complexes, ou encore \(A^n\) quand \(A\) est une variété abélienne dont les endomorphismes sont triviaux). Cela permet d’obtenir d’autres énoncés d’indépendance algébrique. Néanmoins la nécessité de décrire explicitement tous les sous-groupes algébriques réduit le champ d’application de la méthode d’indépendance algébrique.
Le chapitre 4 donne une version entièrement explicite du théorème des zéros de Hilbert pour des polynômes à coefficients algébriques, utilisant les techniques classiques qui remontent à Hermann. Voici un cas particulier de l’énoncé. Si \(P_1,\ldots, P_k, Q\) sont des polynômes de \(\mathbb Z[X_1,\ldots, X_n]\) de degrés \(\leq d\) tels que \(Q\) s’annule en chacun des zéros communs éventuels de \(P_1,\ldots, P_k\), alors il existe un entier positif \(e\leq (8d)^{2N}\), avec \(N=2^{n-1}\), des polynômes \(A_1,\ldots, A_k\) de \(\mathbb Z[X_1,\ldots, X_k]\) de degrés \(\leq (8d)^{2N-1}\), et un entier positif \(a\) tels que
\[ aQ^e =A_1P_1+\ldots+ A_kP_k. \]
De plus, si la hauteur logarithmique (maximum des logarithmes des valeurs absolues des coefficients) de \(P_1,\ldots, P_k, Q\) est au plus \(h\), avec \(h\geq 0\), alors \(\log a\) et les hauteurs logarithmiques \(A_1,\ldots, A_k\) de sont majorés par
\[ (8d)^{4N-1}(h+ 8d \log 8d). \]
Enfin la démonstration (Chap. 5) du théorème principal combine ces différents outils de manière ingénieuse.
On peut espérer que, dans l’estimation finale, la quantité \(2^{k+2}2(t+8)\) pourra être remplacée par \(t+1\). Des progrès dans cette direction ont déjà été obtenus par P. Philippon [Invent. Math. 70, 289–318 (1983; Zbl 0503.10024); Sous-groupes à \(n\)-paramètres et indépendance algébrique, dans: Approximations diophantiennes et nombres transcendants, Colloq. Luminy/Fr. 1982, Frog. Math. 31, 221–234 (1983; Zbl 0513.10036)), et, dans une situation un peu différente, par Philippon et Wüstholz [P. Philippon, Invent. Math. 72, 389–405 (1983; Zbl 0516.10026); G. Wüstholz, Über das abelsche Analogon des Lindemannschen Satzes. I. Invent. Math. 72, 363–388 (1983; Zbl 0528.10024)]).

MSC:

11J89 Transcendence theory of elliptic and abelian functions
11G35 Varieties over global fields
14G25 Global ground fields in algebraic geometry
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